mercredi, 20 juin 2012
Un humain presque parfait

Souvenez-vous : l'article de Pierre, Transhumanisme, l'avènement inévitable et catastrophique d'un fantasme adolescent, proposait une réflexion poussée sur le phénomène typiquement post-moderne du transhumanisme.
Pour prolonger le débat nous vous invitons à regarder cet excellent documentaire Infrarouge de Cécile Denjean, Un homme presque parfait, rendant compte des dernières avancées technologiques en terme de transhumanisme et de post-humain. Ce que vous verrez n'est pas de la science-fiction, cela existe ici et maintenant.
Des améliorations techniques qui posent une somme de questions considérables, notamment en termes d'éthique, de morale, de philosophie, de rapport au corps et à l'âme, à la nature et à la culture. Si certains progrès médico-technologiques sont évidemment bienvenus (soigner la maladie d'Alzheimer et les troubles obsessionnels compulsifs, maintenir en vie des bébés nées prématurément, redonner "vie" à des bras et à des jambes, etc.) d'autres font irrémédiablement penser au Meilleur des mondes d'Aldous Huxley et de Bienvenue à Gattaca d'Andrew Niccol.
Au-delà des problèmes, notamment l'eugénisme (même s'il est libéral, individualiste et non imposé par l'Etat), que de telles avancées peuvent provoquer, la question de la signification même de l'être humain est de nouveau posée, ainsi que du sens que celui-ci donne à la vie.
Comme le dit le philosophe Jean-Pierre Dupuy, "il faut deux conditions pour que la vie est un sens : qu'elle ait une fin et qu'elle soit tissée de hasard. Supprimer la mort et le hasard c'est supprimer le sens de la vie".
Après tout, Rimbaud aurait-il été meilleur poète avec des implants ? Arthur Rubinstein meilleur pianiste avec des mains bioniques ?
Et vous, êtes-vous prêt à implanter Google dans votre cerveau ?
00:32 Publié dans Actualité | Tags : un humain presque parfait, infrarouge, cécile denjean, documentaire, yves michaud, philosophie magazine, jean-pierre dupuy, google dans le cerveau, transhumanisme, sylvain métafiot, pierre alhammoud, cyborgs, idéologie technologique | Lien permanent | Commentaires (2)
mercredi, 06 juin 2012
Le poète qui venait de Mars

Ray Bradbury est mort mardi 5 juin dans sa résidence de Los Angeles. L'écrivain américain était un amoureux des bibliothèques au point qu'elles étaient, pour lui, le meilleur lieu pour apprendre, davantage que l’université qui, selon lui, « n'est pas une bonne expérience ».
De fait, Bradbury défendait les bibliothèques et l'accès gratuit à la culture, mais « Internet, n'est qu'une grande distraction ». Récemment contacté par Yahoo! qui, voilà deux mois, souhaitait mettre en ligne un de ses livres : « Vous savez ce que je leur ai dit ? “Allez au diable. Allez au diable, vous, et votre maudit Internet“ ». Parallèlement, les ebooks sont, pour l'auteur de Farenheit 451, « dénué de sens, ce n'est pas vrai. C'est dans l'air, quelque part ». Pour lui, le seul endroit magique était la bibliothèque publique de Los Angeles dans laquelle il se rendait régulièrement.
Difficile, au-delà du génie littéraire, ne pas avoir une quelconque sympathie pour cet indécrottable conservateur technophobe capable de nous faire voyager aux confins de l’espace dans ses incroyables romans.
22:33 Publié dans Actualité | Tags : le poète qui venait de mars, ray bradbury, mort, science-fiction, fahrenheit 451, chroniques martiennes, écrivain américain, poète, contre-utopie, imaginaire, critique, michel deutsch, sylvain métafiot | Lien permanent | Commentaires (5)
mardi, 29 mai 2012
Que peut la littérature ?

À l’occasion des 6ème Assises Internationales du Roman à la Villa Gillet de Lyon, il ne semble pas incongru - surtout à une époque où l’on considère souvent l’art en général et la littérature en particulier comme de simples divertissements - de se demander qu’est-ce que la littérature ? Ou plutôt, et pour se démarquer du célèbre texte de Sartre : que peut la littérature ?
Plutôt qu’une bête réponse personnelle et sans saveur, je préfère laisser la parole à quatre auteurs remarquables : Juan Gabriel Vàsquez, Jérôme Leroy, Simone Weil et Pierre Jourde (mais aussi et indirectement : Stendhal, Gide, Genet, Fuentes, Vargas Llosa, Proust, Gautier, Pasolini, Breton, Garcia Màrquez, Littell, Ellroy, Primo Levi). Quatre réponses pour le prix d’une ! Ou une réponse en quatre parties, comme vous le sentez.
Tout d’abord, un texte de l’écrivain Juan Gabriel Vàsquez, Romans et cicatrices, qui, à l’occasion d’une table ronde sur la corruption et la violence politique, interroge les liens (mais surtout les différences !) entre politique et littérature :
Les mots de nos morts sont plus précis que les nôtres, sans doute parce qu’ils sont chargés de temps, qu’ils ont de l’expérience ou que leur sens a été modifié par l’expérience. Ceux que j’ai à présent en tête figurent dans La Chartreuse de Parme, chapitre XXIII. Je les ai déjà cités plusieurs fois et je crains de ne pas avoir été le seul. Stendhal écrit : « La politique dans une œuvre littéraire, c’est un coup de pistolet au milieu d’un concert, quelque chose de grossier et auquel pourtant il n’est pas possible de refuser son attention. » Et il ajoute : « Nous allons parler de fort vilaines choses, et que, pour plus d’une raison, nous voudrions taire. »
01:43 Publié dans Actualité | Tags : que peut la littérature ?, juan gabriel vàsquez, jérôme leroy, simone weil, romans et cicatrices, l'enracinement, roman, blasphème, langage politique, langage littéraire, 6ème assises internationale du roman, villa gilet, lyon, responsabilité, stendhal, gide, genet, fuentes, vargas llosa, pasolini, breton, garcia màrquez, littell, ellroy, primo levi, sylvain métafiot | Lien permanent | Commentaires (0)
jeudi, 10 mai 2012
André Gorz : l’autonomie individuelle contre le capitalisme

Alors que le dernier réacteur nucléaire japonais vient de fermer, et que la France s’obstine à considérer « l’atome » comme la seule voie énergétique possible (et ce, malgré la victoire des socialistes à la présidentielle), il semble urgent de revenir aux fondements de la pensée écologique et notamment à l’un des pionniers de l’écologie politique des années 70 en France : André Gorz (1923-2007).
00:28 Publié dans Actualité | Tags : andré gorz, capitalisme, autonomie individuelle, écologie politique, idéologie sociale de la bagnole, japon, marx, misère, nucléaire, pauvreté, utopie socialiste, sylvain métafiot | Lien permanent | Commentaires (2)
jeudi, 26 avril 2012
De l’art de tailler des costards

« Le désir de faire de la politique est habituellement le signe d’une sorte de désordre de la personnalité, et ce sont précisément ceux qui ambitionnent le plus ardemment le pouvoir qui devraient en être tenus le plus soigneusement à l’écart. »
Arthur Koestler
Cela n’aura échappé à personne : la campagne présidentielle est sur le point de s’achever ! Et Dieu sait que durant ce genre de période d’excitation médiatique les livres politiques font flores. Qu’ils soient écrits de la main des candidats (rare) ou de celle de nègres[1] enchaînés dans les caves des QG de campagne (fréquent) la qualité littéraire est toujours la grande perdante de cette soudaine effervescence rédactionnelle. Il n’y a qu’à voir les titres desdits ouvrages pour préjuger du massacre : Changer de destin, Pour que vive la France, Le printemps français, Sans tricher, etc. On baille rien qu’à les énumérer. Cela pour dire que les croquis politiques proposés dans le dernier livre de Philippe Meyer, Sanguines, ne sont pas du même tonneau. Oh que non ! Vous n’allez pas vous ennuyer en attendant le second tour.
[1] N’appelez pas SOS racisme, il s’agit du terme adéquat, datant du XVIIIe siècle et homologué par l’Académie française, pour désigner l’auteur anonyme d’un livre signé par un autre. Si vous êtes chatouilleux vous pouvez toujours employer le terme « prête-plume », plus élégant, ou celui de « ghost-writer » carrément plus classe.
12:51 Publié dans Actualité | Tags : de l’art de tailler des costards, philippe meyer, sanguines, portraits politiques, sarkozy, villepin, aubry, mélenchon, hollande, joly, montebourg, fillon, copé, dsk, hulot, le pen, humour, intelligence, arthur koestler, samuel johnson, sylvain métafiot | Lien permanent | Commentaires (3)
samedi, 14 avril 2012
L’ère du vide

Mesdames, messieurs : le vide
Sombres nuages à l’horizon. L’avenir s’annonce imbuvable. Songez donc : Euro de football en juin, Jeux olympiques en août, Championnat du monde d’athlétisme en 2013, Coupe du monde de foot en 2014, Coupe du monde de rugby en 2015… J’arrête là, je sens votre petit déjeuner remonter. Et je vous épargne les compétitions affriolantes de pétanques, ping-pong et autres savates françaises. Ennui du spectacle sportif toujours identique à lui-même. Présentisme insupportable qui sature l’espace et le temps, usurpe le calendrier et efface le passé et l’avenir.
14:53 Publié dans Actualité | Tags : sport-spectacle, l'ère du vide, inhumain, glorification du vide, éloge du néant, ribéry, football, tennis, tour de france, robert redeker, winston churchill, théo diricq, sylvain métafiot | Lien permanent | Commentaires (1)
mardi, 27 mars 2012
Au Havre tout le monde vous entend crier

Brrrr… Malgré la chaleur estivale je n’arrive pas à me dépêtrer de ce frisson qui me parcoure l’échine. Mon sang est comme glacé. Si vous craignez les grosses chaleurs allez donc vous réfugiez dans une salle obscure pendant 1h45 avec 38 témoins pour vous tenir froid. Résultat garanti. Le dernier film de Lucas Belvaux est l’adaptation libre d’un roman de Didier Decoinmais (Est-ce ainsi que les femmes meurent ? issu d’un fait divers à New-York qui a abouti à la création du 911) mais n’ayant pas lu l’ouvrage en question il ne sera pas fait état, ici, de la comparaison entre le livre et le film. Prenons plutôt l’œuvre de Belvaux telle qu’elle vient : rampant lentement vers nous, trouble et grimaçante, puis se dressant calmement pour nous pétrifier d’horreur.
00:24 Publié dans Actualité, Cinéma | Tags : 38 témoins, au havre tout le monde vous entend crier, lucas belvaux, yvan attal, lâches, meurtre, silence, justice, comprendre, cinéma, sylvain métafiot | Lien permanent | Commentaires (0)
samedi, 10 mars 2012
Error 404

C’est après la mise en place de la scélérate loi Hadopi que l’usage de Megaupload a explosé en France (plus 35 % en 2010). Certains pensant accéder à un moyen légal de télécharger des films (naïfs), d’autres parce que c’était pratique et pas cher (lucides), et d’autres parce qu’ « il faut lutter contre ce système pourri et rendre la culture libre » (rires). Manque de chance, le 19 janvier, sur fond de vote des lois PIPA et SOPA (qui n’ont, au passage, pas favorisé l’offre légale), le FBI a fermé le site et la police néo-zélandaise a arrêté son big boss, Kim Schmitz (Kim Dotcom pour les intimes), qui s’est réfugié dans une « pièce sécurisée » avec une arme mais sans s’en servir (à quoi bon se prétendre le meilleur joueur au monde de Call of Duty 3 si c’est pour faire sa chochotte devant trois policiers moustachus ?).
00:18 Publié dans Actualité, Cinéma, Economie | Tags : error 404, kim schmitz, megaupload, internet, téléchargement, hadopi, pipa, sopa, geek vénal, droit d'auteur, gros, martine, culture gratuite, capitaliste, sylvain métafiot | Lien permanent | Commentaires (3)
vendredi, 09 mars 2012
Les bidouilleurs anonymes

Qui sont ces joyeux drilles ?
Un groupe, formé en 2003, sur le forum d’images 4chan, décentralisé, sans hiérarchie établie, informel et sans structure, qui a l’habitude de croiser le fer avec les ayants-droits des studios hollywoodiens et l’industrie de la chanson, au nom du droit au partage de fichier. Ce collectif, de plus en plus associé à la collaboration d’hacktivistes internationaux, lutte pour la défense de la liberté d’expression par tous les moyens, y compris illégaux, tout en conspuant l’autoritarisme. C’est en s’attaquant à la secte l’église de scientologie, en 2008, qu’ils commencent se faire connaître du grand public. Mais c’est en soutenant Wikileaks que le groupe fit réellement son entrée dans l’arène médiatique internationale. Anonymous s’est engagé pour les révolutions arabes et s’est violemment opposé aux lois, jugées liberticides, PIPA (Protect Intellectual Property Act), SOPA (Stop Online Piracy Act) et ACTA (accord commercial anti-contrefaçon) en attaquant divers sites institutionnels et d’entreprises privées.
22:59 Publié dans Actualité, Economie | Tags : anonymous, bidouilleurs anonymes, hacker, guy fawkes, internet, culture gratuite, l'homme qui rit, victor hugo, pirates, secte, néolibéralisme, masque, v por vendetta, george orwell, animal farm, sylvain métafiot | Lien permanent | Commentaires (5)
mardi, 07 février 2012
The perfect storm

" Mère, nous arrivons d'un pays sans amour / D'un pays où Dieu est absent. / Déluge en tête et crépuscule dans le sang.
La terre obscure est une planète aveugle / Malheur à elle qui s'étend si noire / sous les pieds et sous les maisons.
Elle ouvrira ses yeux ses lèves aux clameurs / Malheur à moi depuis la Genèse jusqu'à ce jour / Et le ciel est mauvais / Si lourd de nuées si mauvais / à la lèvre d'un arbre il n'offre point le lait / de sa poitrine nuageuse."
Uri-Zvi Grinberg, Le Monde sur la pente
Non, la récolte n’est pas si mauvaise en ce moment. En faisant son jardin dans les salles obscures on peut tomber sur un trésor enfouit entre deux navets. Ainsi, nous aurions pu parler de J. Edgar, de Clint Eastwood, qui, après le fadasse Invictus, nous offre un nouveau chef d’œuvre, baigné de lumière froide, retraçant la majeure partie de l’histoire politique des Etats-Unis à travers la figure hideuse, mais néanmoins touchante, du patron du FBI (de par son incroyable prestation Di Caprio fait incontestablement parti des plus grands, oh oui !). Mais c’est Take Shelter qui est au menu et le ragout est plus qu’alléchant.
Le pitch de départ est simple comme bonjour : Curtis LaForche (épatant Michael Shannon, déjà parano extrême dans l’excellent Bug de William Friedkin) est un ouvrier de l’Ohio, fraichement marié, qui vit paisiblement avec sa femme Samantha (Jessica Chastain, la grâce incarnée dans The Tree of Life) et leur fille Hannah (Tova Stewart), sourde et muette. Mais cette tranquillité va être rompue par les violents cauchemars de Curtis qui finissent par l’obséder jour et nuit, au point de renforcer son abri anti-tempêtes.
02:35 Publié dans Cinéma | Tags : take shelter, the perfect storm, jeff nichols, michael shannon, chef d'oeuvre, paranoïa, fin du monde, cauchemars, visions, tempête, thriller, folie, sylvain métafiot | Lien permanent | Commentaires (3)









